Prix du beurre Photo de Jess Bailey Designs provenant de Pexels

Le prix du beurre grimpe … Pourquoi ?

Et pourquoi le revenu des agriculteurs qui font le lait (et donc le beurre) n’augmente-t-il pas ?

Analysons le contexte, le marché du beurre et la position des éleveurs laitiers !

Ces dernières années, le prix du beurre ne cesse d’augmenter considérablement :

  • En janvier 2021, son prix était de 3200 € la tonne.
  • En janvier 2022, son prix est de + 6000 € la tonne.

Le prix de la tonne de beurre a donc quasiment doublé en un an.

La hausse s’accélère encore récemment, avec une augmentation de 33% entre janvier 2021 et janvier 2022.

Le prix de la galette des rois augmente, mais pas le revenu des éleveurs ?

Les médias parlent beaucoup de l’impact de la hausse du prix du beurre sur les boulangers, et notamment en période de galette des rois. Les artisans boulangers répercutent souvent la hausse du prix du beurre sur les produits commercialisés.

Cela est possible puisqu’ils maitrisent la chaine de production et de commercialisation, contrairement à la majorité des éleveurs laitiers qui livrent leur lait à des industriels.

Le consommateur est ainsi la victime collatérale de cette hausse de prix du beurre, avec par exemple + 0,5 centimes d’€ à 1 € de plus par galette des rois vendue en boulangerie artisanale.

Comment le marché du beurre fonctionne-t-il ?

Le beurre est un produit issu du lait, principalement acheté par des industriels auprès des éleveurs de bovins laitiers. Avec 1000 litres de lait, on peut fabriquer 45 kg de beurre ou 90 kg de poudre de lait.

Avec différents types de marchés (français, européen et mondial), les industriels favorisent les débouchés les plus rémunérateurs. Il apparait plus lucratif de fabriquer de la poudre de lait au vu des quantités nécessaires de lait.

Même si la demande française en beurre reste présente, seules 20 000 tonnes de beurre supplémentaires (soit + 5%) ont été produites depuis la dernière crise du beurre en 2017.

En parallèle, la demande en beurre est croissante de la part de l’Asie, qui en consomme + 20%. Il est difficile de répondre à cette demande et opportunité de marché puisque la production de beurre a baissé de 7% en France. Ceci est en partie expliqué par une baisse de la production laitière nationale, due à une déprise laitière avec – 4% de producteurs de lait en 2021.

Qui « se fait du beurre » sur le marché du beurre ?

Il est très clair que la répartition de la valeur ajoutée du beurre n’est pas en faveur des éleveurs laitiers.

On constate un faible revenu chez les agriculteurs, et particulièrement chez les éleveurs laitiers dans le Grand Ouest de la France, bassin laitier majoritairement collecté par des industriels, sans signes de qualité.

Le vieillissement de la population paysanne n’aide pas : il y a de moins en moins de remplacement des éleveurs qui partent à la retraite. Ainsi, la production laitière baisse. Cette situation continuera de s’accentuer tant que l’offre et la demande des élevages à reprendre ne seront pas en phase.

Cette situation généralise les tensions des industriels sur le marché du beurre en France. En parallèle, la situation financière et stratégique des agriculteurs ne s’arrange pas puisque la hausse du prix du beurre n’est pas égale à une hausse du revenu des agriculteurs. Il faudrait aujourd’hui que le lait leur soit acheté a minima à 400 €/1000 litres, pour que les charges et capitaux soient couverts et pour encourager les installations de nouveaux agriculteurs.

Les industriels du lait sont ceux qui, aujourd’hui, « se font du beurre » sur le beurre. La matière grasse du lait permet de fabriquer soit du fromage soit du beurre. Le marché du fromage est plus lucratif : 30% de la production laitière française finit en produits fromagers transformés (cheddar, fausse mozzarella, etc). Plus il y a de fromage fabriqué, moins il y a de beurre fabriqué, donc son prix augmente du fait de sa rareté.

Notre souveraineté alimentaire est-elle en danger ?

La réponse est oui, si l’on s’en tient à un constat du monde agricole :

  • une décapitalisation nette du cheptel bovin français, avec encore une baisse de 2,5% en 2021
  • des importations depuis l’Union Européenne, et à plus petite échelle depuis l’Asie

Il serait catastrophique pour notre pays que sa souveraineté alimentaire ne soit plus garantie à l’avenir. D’autant plus qu’il y a un grand paradoxe : les consommateurs français recherchent des produits d’origine France. Que ferions-nous si à l’avenir, nous n’en trouvons plus ?

Vous êtes éleveur et vous souhaitez agir sur le prix du beurre ?

Reprendre la main sur la vente de son produit est une solution.

Le discours pessimiste est très courant dans le monde paysan. Il a tendance à occulter les situations positives, favorables et encourageantes : il y a des éleveurs laitiers français aujourd’hui qui vivent très bien de leur métier, à la fois d’un point de vue financier, social et humain ! Ces éleveurs ont su analyser leurs exploitations, prendre les bonnes décisions au bon moment, se faire accompagner et oser des changements sur leurs entreprises. A l’image d’entrepreneurs dans bien d’autres domaines !