La phase de l’élevage de génisse laitière après sevrage est une période essentielle dans la gestion de sa ferme.
Dans cet article, nous abordons les aspects techniques, l’alimentation mais aussi la partie économique.
C’est parti pour les 9 étapes incontournables.
Table des matières
Développement des génisses
Il est fondamental de garantir une bonne croissance des génisses jusqu’à 6 mois. C’est à partir de cet âge que pourra alors se décider l’âge au vêlage.
Un retard de croissance les premiers mois de vie est quasiment impossible à rattraper.
Les différentes parties du corps de la génisse ne se développent pas en même temps :
Source : Robelin, 1986
D’abord les muscles et le squelette, puis le tissu adipeux qui se développe surtout à la puberté.
La puberté est influencée par le bon développement de l’animal plus que par l’âge. Selon les races, elle apparait de 9 mois à 13 mois d’âge. Il est alors important de rester vigilant sur les apports excessifs en énergie qui peuvent engendrer un dépôt adipeux autour de l’appareil reproducteur, au détriment des tissus sécréteurs de lait dans la mamelle.
Les notes d’état corporel autour de 3 à 3,5 points favorisent la fertilité des génisses lors de la mise à la reproduction.
Repère de tour de poitrine : ruban ou pesée
Il n’est pas toujours facile d’estimer la croissance des génisses. La mesure de tour de poitrine est un indicateur simple et rapide. A l’aide d’un ruban métrique, placé derrière le garrot et les pattes avant de la génisse, on vient mesurer la plus petite circonférence du thorax.
Cette méthode est moins fiable que la pesée individuelle. Si vous êtes équipé de balance, il est alors recommandé de peser vos génisses à des moments clefs de la croissance : au sevrage, à 6 mois, avant la mise à l’herbe, 2 semaines après la rentrée en bâtiment. Les résultats vous permettront d’alloter de manière homogène, d’ajuster la ration et les compléments et prévoir les dates d’insémination ou intégration du taureau.
Les repères de poids et de tour de poitrine diffèrent selon les races et selon les objectifs d’âge au vêlage. Plus le vêlage est tardif, plus la prise de poids est longue. Plus le gabarit de la race est important, plus la prise de poids doit être rapide.
Age au vêlage et lait par jour de vie
Quel que soit l’âge au vêlage, l’objectif de croissance jusqu’à 6 mois est le même. La décision de l’âge au vêlage peut donc se décider après 6 mois d’âge pour un lot de génisses ou un lot complet.
Choisir un âge au vêlage va forcément impacter le volume de lait par jour de vie. Il a été prouvé qu’en Prim-Holstein, le vêlage précoce à 24 mois conduit à obtenir + 2 kg de lait de plus par jour de vie. En revanche, en race Normande, il n’y a pas de différence significative entre vêlage précoce et tardif. Cependant, il faudra attendre la 3ème lactation de la vache ayant vêlé à 24 mois pour retrouver une production laitière équivalente à celle d’une vache ayant vêlé à 33 mois.
Le poids adulte de la vache est atteint en 3eme lactation. Ne soyez donc pas étonnés de voir les gabarits des vaches évoluer jusqu’à leur 3eme vêlage !
Croissance compensatrice
La croissance compensatrice est une capacité de l’animal à mobiliser ses réserves pour une période de croissance plus forte que la moyenne, après avoir eu une phase de croissance lente. Ce phénomène est facilité chez les animaux de 12 à 18 mois.
Par exemple, une faible croissance l’hiver avec un GMQ de 600 g au lieu de 800, peut être compensée avec une croissance plus forte au printemps (1000 g au lieu de 800g/j).
Il est nécessaire de suivre les croissances de manière assidue, et d’ajuster l’alimentation au fur et à mesure des besoins des génisses.
Complémentation après 6 mois selon le GMQ
De nombreux fourrages sont adaptés pour les génisses de plus de 6 mois. Cependant, il est nécessaire d’analyser les fourrages distribués afin d’ajuster la complémentation et les minéraux. Nos expériences terrain nous amènent à vous conseiller d’éviter l’ensilage d’herbe chez les génisses avant mise à la reproduction.
N’oubliez pas de dérouler quotidiennement les bottes. Sur le terrain, on a constaté une consommation plus élevée des fourrages distribués à l’auge avec des barres au garrot. Les râteliers ont tendance à être positionnés trop en hauteur pour pouvoir permettre une bonne préhension du fourrage.
Concernant les concentrés, les génisses valorisent mieux les céréales quand elles sont broyées ou aplaties. Lors de distribution de céréales et protéagineux en grains entiers, il y a pas mal de gaspillage en termes de digestion.
Exemple 1 :
Prenons l’exemple de ration sèche en génisse de 6 à 12 mois, ayant pour objectif un GMQ de 600 g/jour :
- 4,6 kg MS de foin moyen (0,6 UFL, 60 g de PDIN)
- 1,2 kg de concentré (17% de MAT, 125 g de PDI)
- 25 g d’un minéral de type 0/25/5
Pour 200 g de GMQ supplémentaire par jour, il est possible d’accentuer la complémentation avec 700 g de plus.
Exemple 2 :
Prenons l’exemple d’une ration à base d’ensilage de maïs en génisse de 12 à 18 mois mois, ayant pour objectif un GMQ de 600 g/jour :
- 3,2 kg MS avec paille à volonté
- 700 g de correcteur azoté de type tourteau de soja
- 90 g d’un minéral de type 4/25/5
Pour 200 g de GMQ supplémentaire par jour, il est possible d’accentuer la complémentation avec 200 g de plus de tourteau et 1,4 kg MS d’ensilage.
Faire pâturer des génisses après sevrage
Le pâturage peut être un vrai atout pour l’élevage de génisses.
Si l’herbe est consommée au bon stade, alors elle couvre les besoins de croissance ! C’est généralement la quantité d’herbe disponible qui fait défaut plutôt que la valeur alimentaire de l’herbe. Pour être sûr des quantités disponibles, rien de tel que l’utilisation d’un herbomètre qui viendra vous donner en temps réel la biomasse disponible dans votre parcelle.
Au printemps, l’ingestion d’une génisse est de 2 kg MS par tranche de 100 kg de poids vif. Par exemple, pour une génisse d’un an qui pèse 340 kg alors elle pourra ingérer 6,8 kg MS d’herbe pâturée. Il est tout de même recommandé de proposer un fourrage sec, distribué sous abri, lors des transitions à l’herbe pâturée.
Les repères d’hauteurs d’entrée dans les parcelles restent similaires à ceux en vaches laitières : 10 cm à l’entrée et 5 cm en sortie. Attention à ne pas pâturer trop ras, ce qui favoriserait l’ingestion de strongles pulmonaires et digestives.
Parasitisme chez les génisses laitières
Le parasitisme influence les performances zootechniques et sanitaires des vaches.
Il existe de nombreux parasites. L’objectif n’est pas de tous les éliminer à l’aveugle, mais plutôt de trouver un équilibre entre le niveau d’infestation et la bonne immunité de l’animal.
Les vaches s’infestent par l’ingestion d’herbe parasitée. En effet, les œufs de strongles sont rejetés dans les bouses.
Les strongles respiratoires génèrent des symptômes tels que la toux et des essoufflements. Ils créent un pic d’infestation environ 2 mois après contamination, et est souvent causé par un groupe de bovins plus âgés qui aurait déprimé une pâture avant des génisses.
Les strongles digestifs génèrent eux des symptômes tels que des retards de croissance, des amaigrissements et des diarrhées. Le froid hivernal ne suffit pas à détruire toutes les larves. C’est pourquoi il est souvent recommandé de traiter, notamment puisque le pic d’infestation intervient surtout en été.
D’autres parasites existent, notamment la grande douve (notamment présente dans les parcelles humides), le paramphistome (cousin de la grande douve) et les coccidies.
Il est donc préférable de traiter de manière certaine (donc sur coprologie) ponctuelle, localisée et sur un pourcentage d’animaux représentatifs.
L’analyse au meilleur rapport qualité prix/rapidité reste la coproscopie. Un simple prélèvement de mélange de bouses sur des animaux avec et sans symptômes permet de valider la pertinence d’un traitement sur tout ou partie du lot d’animaux. Pour vous aider à connaitre le nombre d’animaux à traiter, en fonction du nombre total d’animaux présents, cliquez ici.
Utiliser les anti-parasitaires de manière raisonnée permet aussi de limiter les rejets dans l’environnement et la résistance des animaux.
Délégation de l’élevage de génisses
Un bovin laitier comptabilise en moyenne 46% de sa vie à un temps dit improductif. Pour des raisons de coût, de manque de fourrages, de place en bâtiment ou de temps de travail, certains agriculteurs optent pour la délégation de l’élevage de génisses.
Il existe plusieurs formules : délégation via un groupement, avec un départ de la génisse à des âges variés (dès 15 jours ou après sevrage), une date de retour sur l’élevage laitier à des périodes différentes (pour la phase de préparation au vêlage ou après vêlage).
Déléguer l’élevage de génisses a tendance à générer des ateliers laitiers plus productifs (puisque les génisses ont libéré de la surface fourragère), à un produit de vente de veaux plus élevé (grâce au croisement), à une baisse du taux de réforme, à une hausse des surfaces en culture de vente.
Il est possible de limiter le nombre de génisses envoyées en pension complète. Surtout si la trésorerie n’est pas suffisamment souple pour le permettre ! Nous vous recommandons de réaliser un rapide audit de vos motivations et du chiffrage économique de la délégation, avant de s’engager. Autre point crucial : bien déterminer les règles du contrat de pension !
Certains agriculteurs font le choix de n’élever aucune génisse, mais attention à la rentabilité économique de ce type de projet et surtout d’un point de vue de la trésorerie pour l’achat d’animaux !
Coût de l’élevage d’une génisse laitière
Le coût d’élevage d’une génisse englobe le coût alimentaire de la phase lactée au vêlage, mais aussi les charges d’élevage telles que les produits vétérinaires, les inséminations, les analyses, les fournitures, … En moyenne, le cout d’élevage d’une génisse avoisine les 490 € par génisse élevée. En ajoutant les charges de structure, on peut calculer le cout de production d’une génisse : il est en moyenne de 1340 € par génisse dans les systèmes du Grand Ouest de la France.
L’analyse économique et financière de l’atelier génisses peut aussi se faire en calculant le coût du renouvellement, exprimé en €/1000 L. Il permet de calculer les charges affectables aux génisses qui vêlent pour remplacer les vaches de réforme et les mortalités adultes.
Maîtriser l’élevage d’une génisse laitière après sevrage
Pour travailler sans influence commerciale, privilégier un nutritionniste indépendant. Chez Conseil en Agriculture, nous vous proposons des suivis d’alimentation sur l’année ou une optimisation de ration ponctuelle.
Contact : bonjour@conseilenagriculture.fr