Le contrat en viande bovine est un élément essentiel pour sécuriser ses ventes et valoriser son coût de production.

Cet article vous explique en détail les méthodes de calcul, ainsi que les éléments qui doivent apparaître dans votre contrat de vente de viande bovine.

Un modèle de contrat est mis à disposition gratuitement.

La région des Pays de Loire est la première région productrice en volume de viande bovine, avec près de 7000 élevages. 1 gros bovin sur 5 est produit dans cette région et 1 jeune bovin sur 6.

Le contexte national de la filière viande bovine est inquiétant :

👉 Baisse de l’effectif bovins : – 12% sur la région Pays de Loire en une décennie !
👉 En 2021, la décapitalisation du cheptel reste très importante avec une baisse de 4 % de l’effectif de vaches allaitantes.
👉 La production de jeunes bovins a fortement reculé depuis 2010 (-27 %), surtout en type racial laitier.
👉 55% des chefs d’exploitation ont plus de 55 ans.

Le renouvellement des actifs agricoles est un enjeu fort. L’urgence est, entre autres, d’installer des jeunes pour maintenir le cheptel viande.

Les 4 défis majeurs à relever sont :

  • Renouvellement des actifs agricoles
  • Maintien des emplois direct et indirects en filière abattage
  • Limiter les modifications des paysages, en maintenant le bocage, les prairies et l’entretien des sols
  • Rendre possible la rentabilité de l’ensemble des élevages de viande bovine

Comment rendre attractif la filière ?
Les solutions sont multiples, mais les obstacles tout aussi nombreux. Il est temps de redonner confiance aux éleveurs et futurs éleveurs de cette filière.

👉 L’amélioration de la rentabilité est une des solutions.
Les éleveurs ont ainsi tout intérêt à sécuriser leurs ventes, en réalisant des contrats !

Assurer les abattages français parmi des débouchés internationaux

La viande bovine française repose sur deux débouchés :

– Marché français : pour les femelles, les bœufs, les veaux de boucherie et 50% des jeunes bovins de 8 à 24 mois
– Marché de l’export (Allemagne, Italie, Grèce, Pays tiers du bassin méditerranéen) : pour le reste des 50% des jeunes bovins de 8 à 24 mois

Dans le Grand Ouest de la France, les établissements d’abattage et/ou de découpe et transformation de viande bovine sont nombreux. On peut citer les établissements de Elivia Terrena ou encore Bigard Socopa Charal.

Qu’impose la loi Egalim 2 pour un contrat en viande bovine ?

La loi Egalim 2 a fixé un cadre règlementaire pour les contrats en viande bovine.

La loi a été promulguée en octobre 2021. Elle est mise en application depuis le 1er janvier 2022.

Elle contient 4 principes phares :

– Contractualisation tout au long de la chaine
– Contrat écrit obligatoire en amont de la chaine (éleveur producteur)
– Non négociabilité des matières premières agricoles dans les contrats aval
– Renforcement de l’étiquetage

Grâce à cette loi, l’éleveur est en position de ne plus être la variable d’ajustement.

Pourquoi contractualiser ?

– Pour plus de transparence !
– Sécuriser vos ventes et donc votre revenu
– Définir préalablement un prix en rapport avec le coût de production

Pourquoi rédiger un contrat viande bovine ?

Un contrat écrit est garant de la confiance entre l’éleveur et son acheteur (négociant).

Chaque partie doit y trouver son intérêt (gagnant – gagnant). L’éleveur y gagnera en visibilité sur son volume produit et son prix de vente.

Les abattoirs ont aussi intérêt à participer à la contractualisation en viande bovine pour pouvoir sécuriser un approvisionnement en animaux de qualité. Mais surtout, dans un objectif de maintenir les emplois, directs et indirects, permis par la production et abattage de viande.

Un contrat est l’acceptation d’un compromis entre sécurisation et prise de risque.

C’est à l’éleveur de proposer son contrat à son négociant

Ainsi, l’éleveur a la main pour construire son prix !

Quels animaux sont concernés ?

A partir du 01/2022 :

– Jeunes bovins de 12 à 24 mois
– Génisses allaitantes de +12 mois

– Vaches allaitantes
– Tous animaux sous SIQO

A partir du 07/2022 :

– Broutards mâles et femelles -12 mois

A partir du 01/2023 :

– Autres : réformes laitières, croisées

 

Des contrôles progressifs avant les sanctions

En cas de non-respect de la loi Egalim 2, les éleveurs comme les acheteurs se confrontent au risque d’une amende jusqu’à 2% de leur chiffre d’affaires.

Les sanctions sont applicables au vendeur et/ou à l’acheteur.

Les contrôles sont effectués de manière progressive :

1/ d’abord, une vérification des contrats établis et un rappel à la loi

2/ puis, une mise en demeure avec astreinte, en cas de non-respect

3/ et enfin, une sanction financière

D’après le décret paru au Journal officiel le 26 décembre, les éleveurs, dont le chiffre d’affaires lié à la vente de bovins est inférieur à 10 000 €, ne sont pas concernés par l’obligation de contractualiser.

Avec qui dois-je signer un contrat viande bovine ?

Vous êtes directement concerné par l’obligation d’établir un contrat si :
– vous vendez à un négociant de bêtes
– vous vendez à un abatteur
– vous vendez à un boucher
– vous vendez à un distributeur

Vous êtes indirectement concerné si :
– vous vendez à une coopérative : L’éleveur coopérateur donne mandat à la coopérative pour faire un contrat entre la coopérative et l’acheteur. Le règlement intérieur doit prévoir la modalité de prix, qui est votée en assemblée générale. Dans le cas où votre coopérative tarde à établir les contrats avec son acheteur, vous êtes en droit de lui en proposer un.
– vous vendez via une organisation de producteurs (OP) : Le contrat sera réalisé par l’OP, mais l’éleveur s’engage à donner un prévisionnel annuel du volume d’animaux à vendre.

La crainte majeure des abattoirs et GMS est de ne plus avoir assez de viande sur les étalages. L’éleveur est en position de force pour négocier !

A l’inverse, aucune d’obligation de contractualiser si vous vendez :
– en vente directe
– en magasin de producteur
– aux marchés de gros
– via des ventes aux associations

Plus tôt les contrats sont faits, plus tôt l’éleveur sécurise son prix et ses quantités vendues.

Les derniers éleveurs à signer des contrats ne négocieront pas les meilleurs prix de vente.

Que doit contenir mon contrat en viande bovine ?

Chaque contrat doit indiquer :
– un volume d’animaux
– un prix fixe ou déterminable
– une durée minimale de 3 ans

On peut se poser la question de l’intérêt d’une durée de 3 ans minimum. Lors de la négociation de la loi Egalim, les abattoirs ont souhaité sécuriser leurs investissements, le fonctionnement des lignes de production ainsi que leurs emplois.

Dans quel contexte la durée de 3 ans n’est pas forcément appropriée ?

D’un point de vue des éleveurs jeunes installés, la durée de 3 ans n’apparait pas suffisante puisque les jeunes agriculteurs bénéficiaires de la DJA sont engagés sur un prévisionnel technico-économique de 5 années. Aussi, la durée de 3 ans génère des signatures de contrats sur des animaux pas encore nés (notamment les jeunes bovins). Ce n’est pas problématique tant que les contrats sont bien rédigés.

Il est recommandé de rédiger un contrat par catégorie d’animaux et par période.

Par exemple : un contrat pour les vaches allaitantes sur un an ; un contrat pour les taurillons sur un semestre.

Un contrat permet une sécurisation juridique.

L’acheteur, auprès de qui est soumis le contrat, doit donner réponse sous un mois. En cas de refus du contrat, le motif doit être donné. Une négociation peut être engagée entre l’éleveur et l’acheteur.

Comment déterminer le prix de vente de mon contrat viande bovine ?

L’éleveur a deux possibilités pour fixer son prix de vente :

– choisir un prix fixe (situation à éviter)

– définir un prix déterminable : c’est une formule de calcul fondée sur des indicateurs de référence. C’est l’option conseillée.

Les éleveurs ont tout intérêt à négocier une formule de prix (prix déterminable) et non un chiffre (prix fixe) !

Pourquoi ? Le prix fixe ne permet pas de tenir compte ni de l’évolution du marché (engrais, aliments, fuel, viande) ni des coûts de production. Alors que le prix déterminable permet enfin de déterminer un prix de vente en fonction du coût de production de l’élevage !

Comment définir le prix déterminable ?

Le prix déterminable est une formule de prix.

Il se décompose en 3 parties :

A : un indicateur lié au coût de production de référence nationale
B : un indicateur lié au prix du marché
C : un indicateur relatif à la qualité de la viande

Il est très important de bien indiquer les sources, qui ne pourront donc pas être remis en question par l’acheteur.

La formule de prix à déterminer s’écrit :

Prix déterminable =

…% de A + …% de B + … € de C

Il est dans l’intérêt de l’éleveur de maximiser la part de son coût de production (A).
Et c’est possible : Bigard l’a fait dans ses relations avec ses propres clients, tout comme l’OP Unicor.

Bigard a signé avec Carrefour la formule de prix : 90% du coût de production national de la filière viande bovine + 10% du prix du marché.

Source : https://www.reussir.fr/bovins-viande/le-premier-contrat-tripartite-label-rouge-gros-bovins-signe-entre-cevinor-bigard-et-auchan

L’organisation de producteurs bovine du groupe coopératif Unicor a signé un contrat avec Carrefour sur la base d’une formule de prix : 80% du coût de production + 20% du prix du marché + plus-value liée au SIQO.

Source : https://www.reussir.fr/bovins-viande/un-contrat-egalim2-signe-entre-unicor-et-carrefour

Il est donc possible pour l’éleveur de négocier une part importante liée à son coût de production !

Où trouver les valeurs pour fixer la formule de prix ?

A. Les indicateurs de coût de production

Les indicateurs de coût de production sont répertoriés par l’Institut de l’Elevage et les Réseaux Inosys, selon la méthode validée par un accord interprofessionnel.

Source : Accédez ici

 

coût production national

Prendre la valeur de la colonne jaune « Semestre 2 de l’année 2021 » correspondant au type d’animal à contractualiser

A noter que la grille de coût de production en agriculture biologique sera disponible en avril-mai 2022.

Ex : pour un jeune bovin, choisir 5,17 €

Dans la rédaction du contrat, la valeur ne doit pas apparaître car seule la source de la valeur est indiquée. La valeur calculée sert uniquement à calculer votre simulation.

B. Les indicateurs relatifs au prix du marché

Ces indicateurs sont disponibles sur les cotations France Agri Mer nationales des gros bovins entrée abattoir

Source : Accédez ici

 

coût production national

Pour choisir la valeur, choisir en colonne la catégorie d’animaux puis en ligne la conformation moyenne.

Pensez à retrancher le coût moyen de transport, pour qu’il ne rentre dans votre formule de prix.
Si les coûts de transport augmentent, votre prix final ne sera pas impacté, sauf si votre acheteur l’inclut dans une clause de revoyure.

Ex : Pour un jeune bovin de race Charolaise, de conformation R+, la valeur est 5,01. Le coût moyen de transport est retranché, la valeur à intégrer dans la formule de prix est donc de : 5,01 – 0,15 = 4,86 €.

Cette valeur sera intégrée dans la formule telle que : …% de A + … % de 4,86 € + … € de C.

C. Les indicateurs relatifs à la qualité et/ou cahier des charges

Ils sont disponibles sur les cotations France Agri Mer nationales des gros bovins entrée abattoir.

 

coût production national

Si je vends une vache Limousine de conformation U-, j’ajoute + 0,17 € à mon prix déterminable.

Cette valeur sera intégrée dans la formule telle que : …% de A + … % de B + 0,17 €.

Si l’ensemble de mes animaux sont labellisés, j’ajoute + 0,22 € à mon prix déterminable.

Cette valeur sera intégrée dans la formule telle que : …% de A + … % de B + 0,22 €.

Pourquoi fixer une formule de prix en fonction du coût de production ?

Le coût de production est une méthode vérifiée, qui permet d’harmoniser le calcul de PBVV.

Il est exprimé en production brute de viande vive (PBVV), en €/100 kg vif.
Il correspond à PBVV = ventes – achats +/- variations.

Il permet de ramener les produits et les charges en €/100 kg vif.

Le coût de production national est issu de calculs faits sur 1500 fermes françaises.
Seules 118 fermes (naisseur et naisseur-engraisseur) sont utilisées pour calculer le coût de prod national car les élevages sont choisis s’ils sont en rythme de croisière, bien suivies techniquement, analysées économiquement. Les références de coût de production national sont recalculées tous les six mois, grâce à l’IPAP et l’IPAMPA.

A ce jour, l’éleveur a plus intérêt d’intégrer dans sa formule de prix le coût de production national., puisqu’il garantit un schéma de production rémunérateur à 0,5 SMIC en naisseur et 1,5 SMIC en naisseur-engraisseur.
Cependant, pour être certain que la formule de prix négociée est adéquate à son élevage, l’éleveur a avantage de connaître son coût de production « personnel ».

Quels intérêts d'utiliser le coût de production de son élevage ?

Le coût de production permet de connaître le seuil minimal de charges à couvrir sur son élevage. L’élevage commence à dégager une marge quand le prix du marché dépasse ce seuil. Il est donc nécessaire de déterminer son coût de production pour être certain que le prix déterminable de son contrat est supérieur à son coût de production.

Le coût de production détermine les pistes d’amélioration de son entreprise. Il permet de calculer le prix de vente permettant de couvrir les charges et se rémunérer. Si certaines charges sont trop élevées, alors les solutions pour les diminuer sont ciblées.

Quels sont les articles indispensables dans un contrat viande bovine ?

Un modèle-type de contrat viande bovine est téléchargeable en bas de page.
Plusieurs articles sont à intégrer dans un contrat viande bovine :

> La prise en compte des écarts de conformation

Dans l’article 5 – Modalités de détermination du prix
Il est recommandé d’intégrer ce paragraphe pour tenir compte des écarts de conformation :

« Le prix payé pour des animaux d’une autre classe de conformation sera calculé en appliquant les écarts suivants :

+ … cts d’€/kg carcasse pour les tiers de classe supérieurs suivants …

– … cts d’€/kg carcasse pour les tiers de classe inférieurs suivants … »

> Le renouvellement par tacite reconduction

Dans l’article 2 – Durée, intégrer une option permettant le renouvellement par tacite reconduction :

« Le contrat est renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation par l’une ou l’autre partie notifiée par courrier recommandé avec AR au moins 30 jours avant le terme en cours. Pendant ce préavis, le vendeur et l’acheteur continueraient, chacun pour ce qui le concerne, à respecter leurs engagements contractuels. »

> La pénalité en cas de retard sur les modalités de collecte et/ou de livraison

Dans l’article 4 – Modalités de collecte et de livraison, intégrer une option permettant une protection de l’éleveur en cas de retard sur la collecte des animaux :

« Par le présent contrat, les parties conviennent que la collecte ou la livraison aura lieu entre … et … jours à compter de (date) sans quoi :

– la partie lésée pourra résoudre unilatéralement la vente et obtenir des dommages et intérêts

– une pénalité de … € sera appliquée à l’acheteur par jour de retard d’enlèvement. »

> Figer un tunnel de prix

Dans l’article 5 – Modalités de détermination du prix, intégrer un tunnel de prix figeant une borne minimale et une borne maximale à la formule de prix :

« Le prix doit osciller entre les bornes suivantes constituant le tunnel de prix : entre …. € minimum et … € maximum. »

Un tunnel de prix permet de fixer un prix plancher et un prix plafond. Les valeurs des bornes doivent être fixes.
L’intérêt est de s’affranchir des variations extrêmes du prix du marché et du coût de production.

> Reprendre sa facturation en main

Dans l’article 7 – Modalité de facturation et de paiement, privilégier la prise en main de la facturation par l’éleveur :

« Les factures seront transmissibles par le vendeur et payables par l’acheteur en Euros au plus tard dans un délai de 20 jours après la livraison de l’animal, conformément au Code du commerce. Le paiement s’effectuera par (déterminer le mode de paiement). »

> Se protéger avec deux clauses de revoyure

Dans l’article 6 – Clause de revoyure, l’éleveur a avantage à intégrer deux conditions de renégociation.

– sur les volumes d’animaux, selon les conditions d’élevage (sur résultats d’échographie, hausse du cheptel, …), environnementales (selon les stocks fourragers en date de fin septembre, …) ou de stratégie de l’exploitation (installation d’un jeune agriculteur, …)

« Les parties conviennent de se revoir dans un délai de … jours à compter de la signature du présent contrat, afin de faire le point sur les dispositions formalisant l’accord, en cas de variation sur les volumes d’animaux engagés, à l’issue des résultats d’échographie au mois de …., et/ou à l’issue du bilan des stocks fourragers sur la période de fin septembre. »

– sur la borne maximale du tunnel de prix. L’intérêt est de se protéger de l’inflation et de modifier la borne maximale selon la formule : seuil de revoyure = 111% X ( borne maximale / coût de production national )

« Les parties conviennent de se revoir dans un délai de … jours à compter de la signature du présent contrat, afin de faire le point sur les dispositions formalisant l’accord, en cas de variation de la borne maximale du tunnel de prix basée sur la formule : seuil de revoyure = 111% X ( borne maximale / coût de production national.»

> En cas de litige, prouver sa bonne volonté

Dans l’article 10 – Litiges et droit applicable, l’éleveur est protégé s’il prouve son initiative de proposition de contrat. Pour cela, il est indispensable d’annexer au contrat signé la proposition initiale (non signée) de contrat par l’éleveur.

Contrat viande bovine : les 4 étapes clefs !

Vous êtes éleveur et vendez à un premier acheteur de type « négociant » ou « abatteur » ?

1. Préparez un contrat par catégorie d’animaux et par période

Pour organiser votre planning de vente, il est nécessaire de prévoir ses volumes et ses périodes de ventes.
Plusieurs outils sont disponibles pour vous aider, comme le portail Normabev pour les ventes en boucherie, ou encore le tableau de bord annuel à demander gratuitement à l’EDE de votre département.

2. Soumettez-le à vos 1ers acheteurs

3. Attendez un retour de leur part

Si une négociation s’entame, attendez que le prix du marché monte. Sinon, faites un retour pour maintenir le lien.

4. Négocier et signer !

Un contrat n’a de valeur que s’il est signé, daté, paraphé (initiales en bas de chaque page) et annexé des pièces indiquées.